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Mercredi 18 Octobre 2023 à 14h et 19h30 | Jeudi 19 à 10h30, 14h et 19h30 | Vendredi 20 à 10h

12 €/10 €*/8 €**   

En complément du spectacle, le Pays d'Art et d'Histoire du Grand Auch propose des visites zoom gratuites de 30 minutes du Musée de la Déportation et de la Résistance

Mercredi 18 octobre et jeudi 19 octobre à 17h30 et 18h15


Représentation spéciale jeunes le mercredi 18 octobre à 14h, suivie de jeu et de débat pour aller + loin.

Dans le cadre d'une après-midi autour des valeurs de la République.


Nbr de place limité, Prévente et inscription petitepierre.festik.net

AUCH - Centre Cuzin

DIPTYQUE MEMOIRE ET RESISTANCE

Cie Le Cri dévôt

Tout public à partir de 12 ans

Ce diptyque est composé de deux récits fictifs liés à la déportation. Des parcours intimes d’individus face à «la grande Histoire», des personnages tout à fait communs, pris dans l’engrenage de la seconde guerre mondiale et de la déportation, deux récits introspectifs où s’entremêlent les notions de devoir de mémoire et de transmission.

1er monologue

«En ce temps-là, l’amour était de chasser ses enfants»

Ainsi commence le récit de cet homme qui se décide à raconter, sous formes de souvenirs morcelés, un souvenir gravé à jamais dans sa mémoire : l’étrange rencontre avec un père et son jeune garçon dans le wagon qui les emmenait vers Auschwitz. Et surtout l’extraordinaire volonté chez cet homme de profiter de chaque instant pour transmettre à son fils l’essentiel de ce qui aurait pu faire de lui un homme.

Extrait

En ce temps-là, l’amour était de chasser ses enfants. 
Moi, j’avais pu lui éviter, au mien, d’être dans ce train. 
C’est pas mon histoire à moi dont je veux parler. 
Mon histoire, elle n’a pas grand-chose d’original pour l’époque. 
Je ne savais pas ce qu’il adviendrait de lui, mais le fait d’avoir réussi à m’en débarrasser me réconfortait. Il avait une chance, une petite chance de s’en tirer. J’étais seul donc j’étais en quelque sorte plus tranquille. Je ne voulais qu’une chose, une seule ; ne pas penser. Je m’étais tassé dans un coin, les mains sur les oreilles pour ne rien entendre, ou le moins possible. C’était le premier jour. Dans le wagon, c’était un vacarme infernal… Les gens gueulaient, passant de l’affolement à l’abattement, de l’abattement à la révolte, puis au désespoir. 
Et tout à coup au milieu de ce merdier, j’entends tout près de moi, une voix… une voix normale! C’était un homme qui était là, dans un coin, avec son fils. Son fils de douze ans. 
"Regarde-moi. Est-ce que tu as fait tes devoirs pour demain ? Qu’est-ce que vous avez comme matière ?"

2ème monologue 

146298. 

L’histoire d’une jeune adolescente d’aujourd’hui. 
Mais avant tout, l’histoire d’une suite de chiffres tatoués sur le bras de sa grand-mère. 
Elle les a vus toute sa vie sans leur donner plus de sens. 
Puis un jour, en classe, elle comprend. 
D’abord en colère face à ce secret de famille trop longtemps caché, elle parvient enfin à convaincre sa grand-mère de lui parler, de faire le tri dans sa mémoire défaillante : la rafle, le voyage, le camp, la faim... 
Les vies de la jeune fille et de la vieille femme se croisent et s’entremêlent pour se mettre au diapason.

Extrait

Le 6. Je ne trouve pas. Le 4 c’est facile. Quatre jours sans manger, sans boire, dans le wagon qui a traversé l’Europe, qui est remonté vers l’est. 
La soif, j’ai essayé. Je voulais comprendre comment on peut résister. Parce que les mots n’expliquent pas bien. C’est trop abstrait. Je n’ai pas bu d’eau pendant deux jours puis j’ai craqué. Au bout de quatre jours, mamie sort du train, sans lâcher la main de sa soeur. Une femme. Qui tient un enfant. Un bébé. Et le bébé est mort parce que quatre jours sans manger et sans boire, forcément, ça tue les bébés et la femme ne veut pas l’abandonner. 
Le soldat la pousse. Une fois. Puis encore une fois et la femme tombe et le bébé roule par terre. Raide. Un morceau de bois. 
Je suis allée sur internet, voir des images. Ce que j’ai pu trouver de plus atroce.
 Les chats qu’on jette contre les murs. Les oiseaux qu’on flingue à bout portant. Les concours de baffes. Pour être choquée. 
Les images violentes sur mon écran, c’est du rien à côté de ce bébé qui roule sur ce quai. 
J’essaie de me blinder. Ne rien ressentir, ne pas pleurer, ne pas être dégoûtée. 
Comment on fait, comment on peut marcher à côté d’un bébé mort qui a roulé des bras de sa mère ? Comment on peut passer son chemin ? 
Elle suit les femmes et plus jamais elle ne verra son père.

 « Mamie, comment on peut suivre sans résister, sans se révolter ? Comment on peut courber la tête et accepter ? Comment tu as pu marcher, sans te retourner, sans chercher ton père, c’est pas possible, c’est pas humain, c’est pas imaginable. Elle me répond "N’essaie pas d’imaginer."


"146 298" et "En ce temps-là, l’amour" sont deux récits introspectifs où s’entremêlent les notions de devoir de mémoire et de transmission. Un père enseigne des valeurs humaines au fils dans le wagon qui les mène à Auschwitz tandis qu’une jeune adolescente recompose le passé de sa grand-mère à travers les chiffres de son tatouage. L’idée du temps qui passe, du silence rompu et du témoignage enfoui sont des thématiques récurrentes entre les deux oeuvres. Elles s’interrogent et se répondent à chaque fois autour de la question de la construction de soi avec les événements passés.

Je me souviens de l’émotion d’un échange passé avec une ancienne déportée du camp de Ravensbück. Je n’étais alors que lycéen. Je garde précisément en mémoire l’émotion de cet après-midi passé à l’écouter. Aujourd’hui, la richesse et la nécessité pour moi de poursuivre ce travail de transmission prend forme à travers le théâtre. C’est précisément sous l’angle du récit témoigné que nous avons choisi d’associer ces deux textes et d’emmener ce diptyque à la rencontre des spectateurs.

Ces deux écritures font entendre une partie de notre siècle dernier.
Ce qui m’intéresse particulièrement, c’est le traitement du point de vue. Ici, il s’agit de deux parcours quasi identiques: un homme et une jeune femme racontent la grande Histoire du XXième siècle sous la forme de récits intimes.
Ils se décident à parler: de ce qu’ils ont vu, de ce qu’ils ont compris et de ce que cela modifie en eux. Ils convoquent le passé, s’en imprègnent et formulent leur propre réflexion sur leur rapport au monde.
En dévoilant ces paroles oubliées, nos deux personnages agissent contre la diminution de notre mémoire collective.
Ils racontent car ils savent très bien l’issue de leur voyage intérieur: la mort.
La grand mère de la jeune fille s’apprêtent à mourir.
Le père et son enfant n’ont plus que six jours avant d’être exterminés.
Cette conscience de la mort imminente invective nos deux récitants dans cette course contre l’oubli. Il faut raconter. Vite. Une forme d’urgence les entraine chacun à tester toutes les combinaisons possibles pour laisser une empreinte distincte et visible avant de disparaitre.

Nos choix se sont tournés vers des textes forts, beaux et poétiques.

Des textes qui traversent les générations et se répondent dans les problématiques qu’ils soulèvent:
A partir de quand bascule-t-on de la colère, de l’indignation, à la résistance?

Spectaculaire dans l’intime, bavard et généreux, brûlant d’amour, notre diptyque entremêle passé et présent pour nous questionner sur notre résistance d’aujourd’hui: raconter la grande Histoire à hauteur d’homme, et transformer par la seule parole partagée, des récits d’anonymes en héros ordinaires.

Camille Daloz, metteur en scène, Le Cri Dévôt

60 min

Tout public à partir de 12 ans

De Camille Daloz, Avec Emmanuelle Bertrand et Alexandre Cafarelli

Lauréat de l'appel à projet 2023 de la DILCRAH | Complicité du Pays d'Art et d'Histoire de Grand Auch Coeur de Gascogne

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